mardi 6 septembre 2011

Endless Endeavour



Sousaday à tous et merci pour les commentaires et autres retours !

Les messages se sont raréfiés durant cet été (real life oblige) mais le blog n'est pas terminé et encore moins abandonné. Les publications se poursuivent donc bien jusqu'au bouclage du récit de ce Jalan Jalan ! Du coup beaucoup moins de visites ces dernières semaines et c'est compréhensible, j'entends donc renverser la vapeur !! Alors, allons-y...

Que le réveil est laborieux pour les habitants d'Otres Beach ! Moi y compris. Mais j'entame avec allèchement cette nouvelle journée qui s'annonce, placée sous le signe du bougeage d'endroit. Après avoir gentiment négocier mon tuk-tuk la veille pour une poignée de dollars, étant donné que je suis un aficionado de Sergio Leone, me voilà sur la rue de Sihanoukville non loin d'Independance Beach, le temps de choper un internet rapidement et de choper le bus qui se met à rouler vers Phnom Penh.

Le trajet est paisible mais plutôt ennuyeux. En même temps, j'ai déjà eu ma dose d'heures de bus dans ce Jalan Jalan-là. Environ 3 heures de route pour rejoindre la capitale. Je roupille donc vite fait, et me mets dans mon Lonely Planet pour commencer à zieuter ce qu'il se passe là-bas au niveau des backpackers pas chers, étant bien conscient du fait que les chauffeurs de tuk-tuk sanguinaires m'attendraient dès mon arrivée, la bave aux lèvres pour tenter de me vendre je ne sais quel trajet (ou hôtel). Il fallait que je sois "affûstela", comme on dit dans le jargon insaïen rouennais

"Je te dis de vendre tout ce qu'on a en stock-option avant de se faire gauler par le fisc!"

BOUM ! Plus vite qu'il ne faut de temps pour le dire ! Phnom Penh ! Capitale du Cambodge et donc ville majeure d'Asie du Sud-Est, située aux confluents du Mekong et du Tonlé Sap ! Si je ne me bornerais plus à présenter le premier dans ce blog, le second en revanche, est le fleuve majeur cambodgien, s'écoulant depuis le grand lac du même nom, situé en amont (sans déconner!) au Nord du pays. Phnom Penh,  c'est "la colline de la Grand-Mère Penh", du nom de la riche veuve qui l'aurait fait construire. Nous avons donc affaire ici à une vieille dame. Respect aux aïeux. Si vous le permettez chers lecteurs, je vais quand même l'appeler "PP", la vioque, parce que j'en ai marre de me foirer sur l'orthographe de son nom en tapant ces lignes.

BOUM ! Me voilà dans le jus avant même de l'avoir réalisé ! Le bus nous a déposé à proximité du Psar Thmey, un des marchés les plus connus de PP. C'est le bordel, mais je m'y attendais. Et à ma grande surprise, même si les chauffeurs de tuk-tuk sont bel et bien présents, soit je commence bizarrement à m'en sortir dans ces milieux Sud-Est Asiatiques, soit ce sont eux qui sont vraiment sympas. Je pense qu'il doit y avoir des deux, avec un penchant pour le côté sympa des Cambodgiens. J'ai aussi vaguement l'impression que je suis quand même tombé dans quelque chose de plus "soft" que des villes comme Bangkok ou Saigon, et avec surtout des gens plus doux qu'au Viet Nam, lequel continue toujours à me marquer à ce stade de la compétition du voyage.






Et pour cause, si PP rassemble environ un million et demi d'autochtones, son étendue est minuscule comparée à des mastodontes de mégapoles comme la capitale Thaïlandaise (presque 6 fois plus grande que PP). La pauvreté relative du Cambodge face à son voisin Siam prend également sa dimension lorsqu'on compare leurs capitales !

Baptiste et Greg, rencontré à Sihanouk quelques jours auparavant, m'avaient fait signe qu'ils étaient sur un backpackers vers le lac Boeng Kak (côté Ouest de la ville). C'était un des deux endroits que je m'étais fixé pour me poser avec tout mon barda. Mais je n'ai lu leur mail d'information que plus tard, alors une chance sur deux, le pile-ou-face comme on dit, me voilà plutôt dans le deuxième endroit, situé dans le Sud-Est de la ville (et oui, une fois n'est pas coutume, il faut parfois savoir faire des concessions, merci !). Je me retrouve donc sur la Rue 57, puisque beaucoup sont numérotées ici, proche du Sihanouk Boulevard, l'artère d'Est en Ouest menant vers le fameux Independance Monument avant d'atteindre le Mekong.

Wat Phnom


C'est donc le backpackers "Top Banana" qui fut mon premier point de ralliement (avec moi-même et mon lit). Environ 5-10 minutes de tuk-tuk et me voilà devant. Place à laquelle d'autres chauffeurs de tuk-tuk sont massés en guettant la moindre personne entrant ou sortant de l'endroit ! Toujours très avenants, vendeurs,  mais pourtants très sympas, ils engagent la conversation. Les mecs sont tellement cool que je prends plaisir à passer du temps à parler avec eux. Leur raconter mon périple devient vite mission impossible, mais qu'importe. Je n'ai rien à leur acheter (même pour le lendemain pour lequel mes plans restent extrêmement flous) et ils ne m'envoie pas balader pour autant. C'est honnêtement le premier pays où la connexion passe quasi-directement avec les locaux,  avec mon expérience indonésienne (et ils resteront les seuls) !




Je trouve donc une chambre dans le Top Banana. Ce backpacker tire son nom du fait qu'il se situe sur les toits, avec une terrasse sympa en hauteur permettant d'éviter le merdier de la rue et d'avoir un peu de perspective (rien de transcendantal toutefois, en comparaison du prix payé). La terrasse, ses canapés, ses jeux de sociétés et son ordi public, mélé à un minuscule bar, sont accueillants. On sent dans la déco qu'il y a eu pas mal de voyageurs qui sont passés par ici. Mais je ne me sens pas vraiment à l'aise. D'autant plus que les autres voyageurs dans le tas forment un groupe de potes qui voyage ensemble depuis un bout et qui ne sont pas très ouverts à ma présence. Qu'importe, il me reste des bières chaude de Sihanoukville et en plus il faut que je trouve un cyber-café dans le coin pour parvenir à parler à ma copine. Ce que je parviens à faire après 2 heures de marche qui m'ont fait revenir à 200m de mon backpackers. Alors tout va bien au niveau du cyber, puisque je tape les lignes que vous avez lues dans d'autres articles plus avant dans ce blog, je deviens probablement le client du mois, tout en me faisant bouffer la moitié des deux jambes par une armada de moustiques agressifs comme rarement ! Au moins, vu que je suis meetless, c'est à dire solitaire de chez solitaire, voilà ma première soirée à PP occupée à occuper les vôtres ! Ce qui me mets quelque peu dans la galère puisque, visiblement le quartier dans lequel je suis tombé n'est pas des plus animés, et tous les endroits plausibles pour se sustenter aux alentours sont fermés lorsque je sors du cyber sus-nommé.

Phnom Pehn, centre-ville proche des quais sur le Tonlé Sap
Je parviens tant bien que mal à trouver une dame qui fait à manger en bord de Sihanouk Boulevard, minuit approchant. Je mange quelque chose (un genre de soupe de riz) que je ne vois pas, car vous l'aurez compris il fait nuit et l'éclairage public est parfois sporadique même dans la capitale cambodgienne. Et pour vous dire la vérité, c'est plutôt tant mieux car ce que j'avale est relativement dégueulasse...mais ça nourrit et je ne peux m'en prendre qu'à moi-même, ayant laissé passé les heures civiles.


Je me rentre à la piaule pour ma première nuit dans la capitale. La piaule est banale mais propre. 34°C pour dormir, je fais rapidement gicler la moustiquaire, qui me semble être le truc le plus abominable de mon confort en voyage, tant j'ai l'impression d'étouffer là-dessous : je préfère encore devenir la proie des mousticus-gigantus qui trainent dans le coin. Ce sera la première et la dernière au Top Banana étant donné que la charmante (ou pas, elle était superbe mais c'est malheureusement devenu un critère bateau) tenancière du bar m'a sommé de ne passer qu'une nuit au Top Banana, ou de payer plus cher ("ahahaha!") pour une autre piaule, celle que j'occupais étant réservée dès le lendemain. 

Vue en haut du Top Banana



Lendemain donc. Premier mars. Levé assez tard et chaleur bien présente. Il faut que je change de piaule avec tout mon attirail. La tenancière du bar me propose de me réserver une piaule pour le Mini Banana, associé au Top Banana. OK, j'opte cette fois-ci pour un dortoir, bien moins cher, pas gênant pour moi et me permettant de faire des connaissances. Lorsque j'arrive là-bas (300m plus bas sur la rue 57) sur les coups de 10h30 du matin, je trouve un dortoir rempli de sacs à vodka (garçons et filles), qui dorment comme des enclumes par une chaleur et une humidité à crever. Je jette mon sac sur le matelas qui m'est dévolu, et repars prendre un petit déjeuner sympathique et bien mérité (je crevais la dalle car je n'avais pas mangé depuis 36 heures), avant de partir direction Tuol Sleng.


Alors là, vous qui étiez presque entrain de déguster les œufs-bacon du p'tit déj' avec moi, je vous prie de finir votre jouissance.



Car nous sommes à Phnom Penh, et nous sommes dans la capitale d'un pays qui a été meurtri. Meurtri par une guerre civile. Meurtri, à l'issue de cette dernière, par la création de la république communiste du Kampuchea Démocratique (1975-1979), dictature d'une extrême violence, dirigée par les tristement fameux Khmers Rouges, et leur pathétique mais mystérieux leader, Saloth Sâr, bien plus connu sous le nom de Pol Pot (je suis sûr que tous mes chers lecteurs ont déjà entendu son nom). Lui et ses acolytes mirent en place un génocide atroce, massacrant environ 21% de la population de l'époque, approchant les 2 millions de personnes assassinées.






Et pour moi, qui ne connait que très peu cette histoire et qui vous en retransmets, en toute humilité, quelques bribes informatives, j'ai pu déjà sentir ce traumatisme au travers des populations locales. Déjà, le nombre de personnes âgées est incroyablement faible. En discutant avec les chauffeurs de tuk-tuk de la question, c'est une époque dont ils n'aiment pas se souvenir. Certains d'entre eux m'ont également affirmé que la peur touchait encore certains Cambodgiens quant à l'idée que Pol Pot puisse encore faire parler de lui et revenir terroriser la population. Pour information, le mouvement Khmer Rouge ne s'est officiellement dissout qu'en 1998, alors en exil dans les régions montagneuses du pays depuis 1979  (invasion du Cambodge par le Viet Nam), où Pol Pot est, il est dit, décédé cette année-là (98), sa carcasse brûlée avec des pneus.


Voilà. C'est histoire de vous mettre dans le bain. Alors, quand les Khmers Rouges sont arrivés à PP en 1975 pour prendre le pouvoir, ils ont été accueillis en héros de la révolution du peuple (comme beaucoup de meurtriers de masses finalement, les Che Guevara et autres Tito ne s'éloignant guère de ce modèle d'assassin). Très, très vite il a été décidé de vider sa population pour l'envoyer dans les champs aux travaux forcés. Il en a été de même pour toutes les principales villes du Cambodge. C'était la méthode "polpotienne" pour relancer l'économie du pays. Un échec indiscutable, au prix de millions de tués. PP, comme d'autres, est donc devenue du jour au lendemain une ville fantôme. Ou presque. La préoccupation initiale de ces voyous était aussi d'écarter tous les "intellectuels" qui pouvaient être ou devenir potentiellement des ennemies idéologiques du régime. Par intellectuels, on entend aussi bien l'étudiant, que le philosophe, l'ingénieur, le pharmacien, le professeur, le lama du coin, le peintre ou l'écrivain. On ne fait pas dans le détail. Alors on a transformé un lycée (déserté donc) en prison de haute-sécurité. On appelle cela Tuol Sleng, ou "prison S-21" au choix. Situé dans la secteur Sud-Est de Phnom Penh, cet endroit est devenu un des plus forts emblèmes de la répression meurtrière caractéristique du régime de Pol Pot, puisque des milliers de personnes y ont été enfermées dans des conditions abominables, torturées comme des animaux avant d'être finalement envoyées à l'abattoir.

Oui mes mots sont durs mais ce que vous pourrez voir par là-bas est un témoignage important de ce que l'homme peut faire à cause d'une simple croyance et de sa dévotion en cette dernière, et qui peut vous glacer le sang.

Tuol Sleng, se trouve sur la carte non loin du Mini Banana où je réside. Néanmoins, il me faut un petit peu galérer dans ces rues parallèles et perpendiculaires, demander ma route, pour finalement atteindre l'ancien lieu de mort, devenu aujourd'hui un musée. Je suis seul, au milieu de quelques touristes. L'ambiance est lourde dans la cours de récréation...D'une architecture typique d'un lycée colonial à la française, on peut facilement deviner sur les bâtiments les anciennes salles de classe  (ou demeurent encore pour certaines le fameux tableau noir) et les couloirs y menant. Certaines salles de classes sont reconverties en grandes cellules individuelles où sont installés divers instruments de torture dont on peine parfois à voir la fonctionnalité, tant l'inventivité des bourreaux fut sans limite. D'autres salles de classes sont divisées grossièrement à coup de murs de parpaings posés à-la-va-vite afin de créer de minuscules cellules individuelles pour les prisonniers attendant leurs tour.

Des fleurs blanches poussent dans un endroit de mort...

Ancienne cour dans Tuol Sleng




La plupart des salles ne sont d'ailleurs pas aménagées. Dans d'autres, on peut voir tous les portraits des gens qui sont passés par Tuol Sleng. Il y a là des milliers de photographies sorties des archives de la prison, de tous ces gens qui sont morts, tous Cambodgiens sauf un seul : un journaliste australien qui ne s'est vraisemblablement pas fait d'amis dans le régime de l'époque. Les photographies, anonymes (les gens étant uniquement identifié par un numéro), ont un intérêt limité pour moi, car je ne cherche personne et ne possède de connaissance ayant fait l'expérience du S-21. En revanche je prend mon temps pour regarder certains d'entre eux. Les photos sont prise après leur capture, et dans les yeux de ces gens, peut-on lire tantôt l'incompréhension, tantôt la résignation, tantôt la peur, tantôt la défiance...



D'autres salles de classes sont reconverties en point d'informations, où l'on peut en apprendre un peu plus sur les bourreaux, en l’occurrence les leaders Khmères Rouges. Et au moment où vous lisez ces lignes, nous sommes en plein dans l'actualité car le procès -sous mandat de l'ONU- des derniers de ces salopards encore vivants a commencé il y a peu. Le personnage qui ressort souvent , et qui est actuellement jugé, se nommant Kang Kek Ieu, dit "Douch", le chef du S-21 à l'époque, et qui a été responsable de nombreuses atrocités pendant cette période. Remarquez que c'est le seul des inculpés à admettre sa culpabilité et à demander pardon, les autres responsables de l'époque niant absolument tout.

Enfin voilà. Tuol Sleng c'est pas la joie, vous l'aurez compris, mais c'est pourtant un attrait touristique majeur à PP et je suis content d'y être passé.



En sortant de là, je chope un tuk-tuk et lui demande de m'amener dans les quartiers plus animés : le coin des quais sur le Tonlé Sap au Nord-Est, proche du marché Psar Chas. Ce qui me permet de me balader tranquille regarder les bateaux passer sur le fleuve. Les berges à cette endroit  là ne sont pas vraiment jolies, mais cela me permet aussi de me renseigner auprès des compagnies de bateaux pour connaître le prix du voyage fluvial sur le Tonlé afin de rallier Siem Reap le surlendemain. Beaucoup, beaucoup trop cher en comparaison avec les prix des bus. Je décide donc d'abandonner l'idée.



Wat Phnom



Ces quartiers-là, aux allures coloniales françaises, avec leurs petites rues, sont vraiment sympa. C'est ici que les expatriés choisissent de sortir en soirée (ce dont je n'ai pas fait l'expérience car logeant assez loin  je n'étais pas motivé pour m'y trainer seul). À force de me balader dans le coin, je tombe évidemment sur le Wat Phnom, qui est The Temple de la ville, juché sur une toute petite colline au milieu des arbres. Le petit parc circulaire l'entourant est très agréable, de nombreux locaux squattant ici et là dans l'herbe, les cigales cambodgiennes nous interprétant un assourdissant concert qui masquerait presque le bruit du trafic automobile proche.

Parc proche de Wat Phnom
Je décide, malgré le fait d'être complètement en nage (il fait une chaleur à tuer un vieux) de profiter du soleil déclinant pour rentrer à ma piaule tranquillement à pieds, ce qui me permettrait de traverser les quartiers sympatoches tranquillement pendant environ une heure, égarement personnel exclu (mais non, je ne me suis pas perdu !).

Très rapidement je me fais alpaguer par quelques chauffeurs de tuk-tuk qui zonent non-loin de l'ambassade américaine, proche du Wat Phnom. Leur annonçant que je préférais cette fois utiliser mes pieds plutôt que leurs services, cela ne les empêche pas d'être curieux et de vouloir discuter avec moi. Je passe donc bien une vingt minutes à tchatcher de tout et de rien avec les gaziers, des sujets les plus légers comme les plus sensibles, tout en rigolant grassement sur nos différences culturelles. Ces mecs-là sont adorables. Je poursuit mon chemin à travers des rues aléatoires de PP pour finalement traverser le Psar Thmey, un des grands marché du centre-ville, que je visite sans trop m'y attarder néanmoins. Pas mal de fripe à y trouver semble-t-il.

J'enchaine ces longs boulevards parallèles et perpendiculaires, passe devant un espèce de trucs posé la pour un mariage :

Ah ! L'Amour.


En arrivant proche de mon backpacker, les tuk-tuk fidèles au poste me reconnaissent et me lancent un "Mister Vietnam ! You need transport !?". Bon. Fêtons-ici le 1000ème "No, thanks" de ce Jalan Jalan ! Comme quoi le "non" reste un mot important de nos jours...D'ailleurs, pour la petite anecdote, les mecs m'appellent Mister Vietnam car ils m'ont vu arriver le premier jour avec le débardeur représentant le drapeau du voisin géographique (l'étoile jaune sur fond rouge), et n'en démordent pas depuis. C'est néanmoins plaisant de voir que les locaux, bien que dans un élan mercantile rarement récompensé, me reconnaissent à chaque fois que je passe, me font des grands sourires et me tapent volontiers la discute.

Je rencontre un tuk-tuk local sur la rue du Top Banana qui me propose de m'emmener le lendemain aux Killing Fields (une autre joyeuseté, j'y viens bientôt). Il se fait appeler M.Smith (on a tous des pseudos dans ce pays), est super fier de sa machine, ainsi que de ses pures lunettes de soleil étant  probablement une imitation d'une grande marque. Il me parait vraiment sympa alors je décide de faire affaire avec lui et lui demande de m'attendre le lendemain pour m'emmener.




Mon plan du lendemain étant également de me rendre à l'ambassade de Thaïlande afin d'obtenir un visa de deux mois (celui délivré sans demande n'est que de 30 jours), puisque je me prépare tranquillement à me diriger vers le voisin Siamois que j'avais laissé quelques mois plus tôt.

Je trouve un petit bar/restau visiblement tenu par un australien, non loin de ma piaule, pour accomplir la tâche nécessaire de dîner. En tant que "jeune petit français voyageant seul et visuellement potable", je me fais embrigader dans les histoires de deux australiennes de la cinquantaine bien passée, obèses et pas très fraiches, table à côté, descendant toute sorte d'alcool à une vitesse inquiétante, proférant des injures grotesques  adressées à la gent masculine. Il ne manquait plus qu'elles fassent un concours de pet, le tableau aurait été complet. Me déblatérant toute sortes de volutes verbales afin de me faire comprendre que "l'Asie du Sud-Est, tu peux pas test", que "ça fait des années que je me pinte la gueule à Phnom Penh et j'adore ma vie" ou encore que "les pseudo-villages de pêcheurs non-loin de Siem Reap sur le lac Tonlé Sap sont un attrape-touriste remplis de gredins et de connards". Quel charme, quel régal ! Je finis mon assiette et trouve un subterfuge pour me barrer, en refusant les verres de rye qui m'étaient proposés.


Psar Thmey

Dans le dortoir quasi-vide du Mini Banana, je fais connaissance avec un américain typé asiatique complètement coincé et dont tout le monde ici se fout du nom, et d'un jeune français étudiant l'ingénierie à Singapour : Yann-Loup. Tous deux voyageant seuls. Vu qu'on est les trois seuls péquins à être là, on peut tchatcher tranquille pendant une bonne heure...de plongée sous-marine principalement. Complètement claqué par ma journée à marcher en plein cagnard et les émotions de Tuol Sleng, je sonne finalement l'heure des plumes, car la journée suivante s'annonce sportive.

Encore un temps magnifique et un soleil de plomb sur la capitale cambodgienne. Les moustiques sont dans la place, et le tuk-tuk m'attends comme prévu. J'avais réussi ma manipulation machiavélique consistant à motiver Yann-Loup pour l'excursion aux Killing Fields, afin de partager également le tuk-tuk (l'endroit se trouve à environ 14 Km du centre). C'est au moment de partir que nous rencontrons deux femmes néo-zélandaises (une mère et sa fille), qui se montrent également intéressés pour venir. C'est donc à quatre (plus le chauffeur) que nous prenons tranquillement la route, en cette fin de matinée. La chaleur est déjà bien pesante, mais le trajet à 50 Km/h dans notre petite carriole la transforme en vent chaud et doux, chargé d'odeurs.
Stallone qui monte un restau à Phnom Penh ?

Si les odeurs du début de trajet correspondent à la ville bétonnée et polluée que l'on rencontre dans les quartiers environnant le centre de Phnom Penh, l'urbanisme décroît très rapidement à mesure qu'on roule vers le Sud. C'est là qu'on se rend compte de la taille plutôt modeste de la capitale. Très vite, les bâtiments s'appauvrissent et on se retrouve presque au milieu des rizières et zones marécageuses proche de l'étang de Tompum. Les odeurs changent, très vite la campagne. Cette campagne cambodgienne que je n'aurais vu que trop peu.




Arrivée aux Killing Fields
Mémorial des Killing Fields





Arrivée donc aux Killing Fields, de leur véritable nom Choeung Ek. L'endroit est fait pour accueillir le touriste. Mais c'est plutôt désert. L'endroit en question ne respire pas le bonheur puisque c'est un autre mémorial concernant le génocide cambodgien. Et quel mémorial : nous sommes là dans un lieu ou l'on a découvert des dizaines de milliers de gens enterrés dans des fosses communes ! La plupart de ces personnes arrivait directement du S-21 dont je vous parlais auparavant, et il est impossible pour la large majorité d'ossements et crânes d'identifier leurs propriétaires. Le mémorial de Choeung Ek en lui-même consiste en ces quelques anciennes fosses communes (accompagnées de statistiques morbides, faut-il ajouter que les bébés étaient également assassinés sur place, afin d'éviter toute représaille future ?), en un petit musée et en cette tour de béton et de verre de 10 mètres de haut où sont empilées des centaines de crânes humains non-identifiés. L'horreur absolue !



Dents & ossements ramassés ça et là...

Lorsque vous vous "promenez" entre les fosses communes, il n'est pas rare de trouver soi-même, au sol, des morceaux d'os, des dents ou des oripeaux remontés à la surface par la dernière pluie. C'est à vous glacer le sang. Et l'horreur n'est vraisemblablement pas terminée car plusieurs sections de Choeung Ek n'ont pas encore été explorées et l'on sait que d'autres fosses se trouvent dans ces endroits. 35 ans après, on continue donc de découvrir les abominations khmères rouges. À rajouter à la liste déjà bien solide des saloperies perpétrées par les révolutions communistes du monde entier. 




Fosses communes de part et d'autre


J'arrête de parler de ça. Mais c'était nécessaire après mon passage à PP. Retour donc en ville, après environ une heure de visite, dépose des néo-zélandaises (avec qui la rencontre n'a pas été la plus excitante du voyage) et de Yann-Loup. Je reprends seul le tuk-tuk de M.Smith pour qu'il m'amène à l'ambassade Thaï. Me faisant là-bas signifier que j'ai besoin d'une photo d'identité pour obtenir mon visa, me revoilà dans le tuk-tuk qui me fait traverser la moitié de la ville pour trouver un magasin de photo (trajet supplémentaire que M.Smith me fera payer un œil, ce qui au vu de ma fidélité en tant que client était un peu limite, vous imaginez bien que je me suis fait une joie de lui signaler). Deuxième passage à l'ambassade en moins d'une heure, obligé de monter un peu le ton pour bouger l'administration Thaï afin obtenir le visa le lendemain matin (avec récuparation du passeport juste avant mon départ pour Siem Reap) : succès.

Je repart me balader vers le centre-ville et le Palais Royal (residence du roi Norodom Sihamoni, un peu hermétique mais superbe). Je m'arrête déjeuner dans un petit restau où mon allure fait vraisemblablement impression auprès des jeunes filles serveuses (allez savoir pourquoi). Finalement, j'en ai vite marre de marcher tout seul et décide de me faire une petite folie (2€, je suis tout fou) en me payant un tuk-tuk pour me faire le tour des endroits sympa du centre et me ramener à ma piaule.


Quais du Tonlé Sap





Independance Monument
 


Je peux enfin aller me la couler douce : je rentre donc au Mini Banana, et discute avec la petite minette qui bosse là, tout en sirotant un cocktails de 15 fruits, me revigorant le corps et l'âme "meurtris" par les visions de la journée et la course au visa. L'après-midi se termine doucement à lire un Surfers' Journal (refilé par mon pote Will du Viet Nam) dans un hamac. J'assiste, impuissant (sic...), au départ de Yann-Loup vers d'autres contrées.

Une rue proche du Top Banana (at dusk)






Maly (cf.épisodes précédents) est cambodgienne. Enfin, elle est française, mais cambodgienne aussi, malgré le fait qu'elle habite à Hong Kong. C'est en effet un bordel sans nom mais toujours est-il qu'elle a de la famille à Phnom Penh, entre autres. C'est là où je voulais en venir. Je pouvais grâce à elle bénéficier de logements et d'accueil aux Cambodge, chose que je n'ai pas osé faire (par pudeur uniquement, et non par trouille bleue). Néanmoins, une rencontre avec une des ses cousines, nommée Naroth a été arrangée pour mon dernier soir sur la capitale.


C'est sur les coups de 21h que je reçois un coup de fil de sa part me disant qu'elle arrivait en voiture pour m'emmener bouffer au restaurant. Super ! Je ne vais pas bouffer seul ou avec des australiennes obèses en rut ! Au lieu de ça, je fais donc la rencontre de Naroth, à peu près mon âge, étudiante en droit à Phnom Penh, raffinée et élégante, son petit frère d'une dizaine d'années et dont le nom m'échappe aujourd'hui, ainsi qu'une amie à elle, probablement curieuse de me voir. Nous n'avons aucun mal à échanger en anglais et à déconner, ce qui semble être de bonne augure pour la suite de la soirée.

Une nouvelle pote au Mini Banana


Elle m'amène dans un endroit, proche de l'Independance Monument, que je n'aurais jamais trouvé seul. Il n'y a que des locaux ! Parfait, c'est exactement ce que j'attendais ! Et effectivement, ne comprenant que dalle à la carte, je laisse les locales faire le travail de commande, un peu fébrile. Tâche qu'elles gèrent parfaitement, pour nous retrouver avec tout sorte de bouffe cambodgienne plus ou moins bizarre (des sauces à base de poissons pourris et tout, c'est meilleure que ça n'en a l'air je vous promets). Bref ! Un bon repas en bonne compagnie, des découvertes et des rencontres, que demander de plus pour ces derniers moments à PP ! La soirée se termine tôt, boulot oblige, ce qui n'est pas plus mal dans mon cas considérant la journée de transit qui m'attend. Merci donc à Naroth pour sa sympathie, pour la petite soirée et la petite expérience locale très concluante.


C'est la fin de ce billet, car le lendemain fut dédié à la récupération de mon passeport sous la pression, et le bus direction Siem Reap et bien évidemment, les Temples d'Angkor. Une expérience incroyable qui vous sera contée dans le prochain épisode (qui ne sera pas publié dans 3 mois je vous assure). Encore désolé de vous avoir cassé le moral sur les questions historiques du pays, ce n'était pas le but. Merci pour vos commentaires, vos soutiens et vos critiques. À très vite.


Peace, Love, Gaïa !